Comment la Faculté de médecine s'est-elle adaptée à la crise sanitaire au niveau pédagogique ?

Il y a eu 2 périodes : le confinement total de mars à mai 2020 et le 2e confinement d'octobre à décembre 2020. La première période nous a permis de mieux appréhender la seconde.

Lors du premier confinement, la faculté a été subitement fermée pour tout le monde : professeurs, étudiants et personnels administratifs. Il a fallu du jour au lendemain passer au tout numérique pour les cours et les évaluations. Cela a été difficile pour les étudiants, notamment pour ceux qui ont vu leurs stages hospitaliers interrompus et complexe pour la mise en place au niveau technique, car nous n’étions pas préparés à cette nécessité. Nous avons essayé de faire au mieux avec le concours de l’ensemble des intervenants. Concernant les évaluations, hormis pour la PACES et l’ECNi, elles ont été faites en distanciel, ce qui n’était pas très satisfaisant vu les modalités docimologiques en vigueur.

Lors du déconfinement, notre objectif prioritaire a été de préparer la rentrée de septembre 2020 du mieux possible. Lorsqu'est arrivé le 2e confinement, le passage aux cours à distance avait pu être anticipé et organisé. De même, l’utilisation de la plateforme Moodle a été optimisée : nous avons demandé aux enseignants de mettre certains cours ou supports d’enseignement en ligne et d’introduire, si cela était possible, un contrôle continu dans les évaluations. Pour les Enseignements Dirigés, les interactions sont plus faciles en distanciel que pour les cours magistraux, puisqu'il s'agit de petits groupes. À condition que les étudiants soient suffisamment équipés. Certains ont pu bénéficier d’un prêt de matériel informatique pour qu'ils puissent travailler à distance. Depuis le mois de janvier 2021, des étudiants peuvent assister aux cours en présentiel, en respectant une jauge de sécurité. Tous les cours sont filmés et enregistrés ; ce système hybride permet donc à chacun de suivre l'ensemble du cursus. Les cours en laboratoire d'anatomie, en plateforme de simulation et sur le plateau technique expérimental ont été maintenus en petits groupes. Malheureusement, les cours de théâtre en 4ème année sur la relation patients/soignants ont dû être annulés. Concernant la place des étudiants en stages hospitaliers, après une période difficile au printemps 2020, ceux-ci ont pu poursuivre pleinement leurs formations. Cette difficulté d’accueil a été liée d’une part à l’investissement des enseignants auprès de patients COVID et d’autre part à la déprogrammation de patients rendant ces stage moins formateurs. Parallèlement, des étudiants de 3° année ont également accepté de suivre une formation d’aides-soignants ce qui leur a permis d’aider au fonctionnement de certains services lors de la deuxième vague, au niveau du CHU de Montpellier comme dans une autre structure régionale.

Comment ont été pris en charge les étudiants en difficulté ?

Nous avons eu des réunions régulières avec les représentants des étudiants et avons tout mis en œuvre pour faire circuler les informations via le site de la faculté. Il faut noter la remarquable implication des tuteurs et des associations étudiantes dans ces périodes. Il en est de même de la part des internes qui organisent les conférences de préparation à l’ECN. Les tuteurs se sont adaptés et ont tout fait pour soutenir et guider les étudiants de PASS et les redoublants de PACES, avec des séances et des colles dématérialisées en live Zoom, enregistrées pour ne pas pénaliser les étudiants ayant une connexion instable. Les associations portent des charges bien lourdes. Il n'est pas facile dans le contexte actuel de concilier travail personnel, engagement associatif et soutien.

Le contexte actuel est d'autant plus ardu qu'il a fallu gérer la réforme. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet ?

Il s’agit effectivement d’une période particulière à deux niveaux : 1 – S’adapter aux conditions d’enseignement liées à la période sanitaire actuelle 2 – Mettre en place les réformes en cours pour les études de médecine qui concernent et vont concerner l’accès aux études de santé (médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie, mais également kinésithérapie et ergothérapie), le premier cycle et le deuxième cycle des études médicales.

Ces deux points ont nécessité (en vont nécessiter) un investissement important de la communauté enseignante afin de répondre aux objectifs de ces réformes et permettre aux étudiants de la Faculté de Médecine de Montpellier-Nîmes une formation pleinement adaptée aux nouveaux référentiels de connaissances et compétences qui ont été définis.

Nous avons tous été un peu bousculés dans nos habitudes d’enseignements mais, pour partie en tout cas, les nouvelles modalités d’enseignements utilisées depuis quelques mois (avec l’essor du numérique) peuvent s’inscrire dans nos organisations pédagogiques à venir. Il n’en reste pas moins que le contact direct entre étudiants et enseignants hospitalo-universitaires comme praticiens hospitaliers, en ED ou TP, ainsi que la présence des étudiants en stage, restent la base de notre formation aux Études Médicales.

Pour compléter l'interview du Professeur Denis Morin, voici les témoignages de 3 étudiants sur le tutorat, le service sanitaire et le stage de 3ème année.

Les témoignages

carla fernandez

Carla Fernandez


Etudiante en 2e année : tutorat

Le Tutorat est essentiel aux étudiants durant cette période compliquée, que ce soit par rapport à la pandémie ou encore par rapport à la réforme PASS. Nous les accompagnons du mieux que nous pouvons en dispensant les séances de tutorat en visio via l'application Zoom, nous avons également mis à leur disposition des créneaux entre midi et deux, certains jours de la semaine où ils peuvent venir nous poser des questions sur les matières enseignées, cela également via Zoom. Le tutorat propose des colles communes et des examens blancs pour être prêt le Jour J. Ainsi les premières années ont un cadre de travail qui les motive pour garder le cap et poursuivre leurs efforts ! Depuis peu, certaines séances ont repris en présentiel pour les PASS. Tout en gardant les distances et en respectant les gestes barrières, cela permet pour certains de sortir de chez eux et de voir du monde... Les étudiants se posent énormément de questions concernant la réforme. Ils ne savent pas comment se réorienter s'ils échouent, ils ne connaissent pas le nombre d'étudiants acceptés en année supérieure. Cela est très compliqué pour eux, c'est pourquoi nous nous renseignons auprès de professeurs pour leur donner le maximum de réponses. Pour ma part, je suis tutrice de physiologie au tutorat santé de Nîmes, mais également marraine auprès de premières années. En tant que tuteurs, nous sommes présents pour eux d'un point de vue pédagogique, mais plus particulièrement social. Nous les soutenons du mieux que nous pouvons et restons à leur écoute tout au long de l'année. C'est un plaisir de pouvoir être aux côtés des étudiants pour surmonter cette passe avec eux !

Hugo-Sidjilani

Hugo Sidjilani


Etudiant en 3ème année : SESA

Le service sanitaire En troisième année a été mis en place depuis 2 ans le SESA qui consiste à intervenir dans des écoles primaires et collèges de quartiers prioritaires. Dans le contexte actuel, on a pu répondre aux différentes questions des enfants d'une classe de CP concernant le port du masque, le virus et les gestes à mettre en place. Bien sûr tout cela en respectant les gestes barrières. Ces interventions se répartissent sur toute l'année avec des phases d'observation et d'intervention, ce qui permet d'échanger activement avec les élèves, les professeurs et le directeur qui sont très impliqués.

Floriane Spadot

Floriane Spadot


Etudiante en 3e année : stage

En troisième année, nous n’avons pas le choix des services hospitaliers dans lesquels nous sommes envoyés en stage. J’ai effectué le mien en février dans le service de gériatrie du CHU de Nîmes qui était devenu une unité exclusivement pour les patients COVID. Cela impliquait logiquement des protocoles supplémentaires d’habillages (lunettes, charlottes, sur blouses jetables) avant l’entrée dans les chambres des patients, puis de désinfection des instruments à la sortie. Les stages de novembre ayant été annulés avec la fermeture de la faculté, c’était mon premier vrai stage de médecine dans un service hospitalier. Le service accueillait des patients âgés ayant eu un test PCR positif et qui étaient soit déjà hospitalisés dans d’autres services avant, soit symptomatiques. Ainsi, il était enrichissant du point de vue d’un jeune étudiant en santé de suivre des patients avec des pathologies relevant de spécialités diverses et de constater les différentes conduites associées à tenir. Les stages nous confrontent aussi humainement à certains aspects de notre futur métier pour lesquels il est plus difficile de se préparer avec des cours théoriques, et qui sont encore plus marqués en période de COVID : cela comprend les décès, les patients en ATA (Arrêts des thérapeutiques actives), mais aussi l’importance du lien avec les patients qui sont plus isolés qu’avant avec les restrictions sur les visites, même si ce rôle de contact est souvent plus porté par les paramédicaux qui passent plus de temps auprès des patients.