interview de la responsable communication numérique

au Musée Fabre, Anne Le Cabec

Conçue pour mettre en valeur le patrimoine historique de la médecine et de la pharmacie de Montpellier, l'application Fabre & The City saison 2 s'inscrit dans le cadre des 800 ans de la Faculté de Médecine. Sortie le 10 octobre, mise en veille pendant le reconfinement, elle peut à nouveau entraîner touristes, familles, étudiants dans les ruelles de l'Écusson, sur les pas de personnages illustres à découvrir ou à redécouvrir. Retour sur la genèse de l'application, à travers une interview d'Anne le Cabec, chargée de projet multimédia et responsable de la communication numérique du Musée Fabre

L'application inaugurée le 10 octobre est une deuxième version. Pourriez-vous nous parler de la première saison ?
Pour la première version nous avions fait appel à un dessinateur et à un scénariste qui avaient personnifié une sélection d'œuvres racontant leurs souvenirs de la genèse du musée à Montpellier au 18e siècle. Ce roman graphique a donné lieu à une application géolocalisée permettant de découvrir une quinzaine de points liés à l'histoire de l'art et de l'urbanisme au 18e siècle. L'intention était d'inscrire le musée sur son territoire et de le montrer autrement, au travers d'autres formes, d'autres tons donnés aux contenus et à l'information. Cette première saison, lancée en novembre 2018, a été construite en collaboration avec l'Office de Tourisme. Il y avait des choses à creuser, à faire évoluer, à enrichir. Nous avons donc fait évaluer cette première mouture par des étudiants en master communication digitale à Montpellier Management. Les résultats ont montré que les utilisateurs, quel que soit leur âge, avaient soif de jeux et de scénarisation dans la découverte, et qu'ils n'attendaient pas seulement des contenus apportés, même s'ils étaient ludiques et renouvelés. C'était la première conclusion de l'évaluation. Et surtout, deuxième conclusion, la première saison apportait des dessins à scroller, là où les jeunes sont plus friands de vidéos. On a voulu tenir compte de ces deux points importants pour la deuxième saison.

Comment vous est venue l'idée de la thématique ?

La deuxième saison s'est imposée avec le sujet de l'anniversaire de la faculté de médecine. Pour le célébrer, deux expositions ont vu le jour, « Art et anatomie » et « Pharmacopées », réalisées par la conservatrice Florence Hudowicz, en collaboration avec la Faculté demédecine. Ce sujet de territoire permettait également de travailler avec l'Office de Tourisme qui avait l'intention d'exploiter la thématique.

Comment avez-vous procédé ?

J'ai pris contact avec l'Université pour expliquer le projet. Gérald Chanques et Christophe Bonnel, membres du Comité de pilotage des 800 ans, avaient eux-mêmes des idées, des envies autour d'un dispositif numérique dédié à la découverte de l'histoire de la médecine. Cela coïncidait bien avec la façon dont nous voulions présenter cette histoire. Nous nous sommes retrouvés sur une intention commune. La Cité Intelligente de la Métropole avait soutenu la première application, elle a décidé de nous accompagner pour cette deuxième version. En tenant compte des évaluations de la première saison, j’ai imaginé un dispositif numérique articulant parcours scénarisés, gameplay et séquences animées

J'ai monté un marché avec cet axe gamification / géolocalisation. Il me paraissait pertinent de restituer des scènes liées à histoire de la médecine et de la pharmacie avec de l'animation. Florence Hudowicz, ma collègue conservatrice commissaire des deux expositions autour de la médecine et de la pharmacie, m’a accompagnée avec passion dans cette aventure. Le projet doit beaucoup à son enthousiasme et son expertise scientifique. C’est assez magique de voir prendre vie les Dames de la Miséricorde, Guy de Chauliac, Lapeyronie, Chaptal… d’assister à une dissection, d’entrer dans une pharmacie du 17e ou de visiter un cabinet de curiosité de la Renaissance… !

Parlez-nous du dessinateur. Comment l'avez-vous choisi ?

Pour cette deuxième saison nous avons choisi de nous adresser à une agence d’animation. Le dessinateur n’est donc pas le même que pour la première saison. Mais comme le précédent, il a su construire un univers graphique, cette fois-ci coloré, adapté au sujet. Dans l'application, les séquences animées sont intégrées dans une petite narration et concluent les missions. L’information passe souvent de manière plus directe et plus percutante avec une animation qu’avec un long texte. L’expérience nous semblait donc plus efficace, et ce d’autant plus dans un contexte de jeu en plein air. Les animations ont été réalisées par « Les Fées spéciales ». Eric Serre, le dessinateur talentueux qui a supervisé la création graphique, a travaillé pour Michel Ocelot, réalisateur de célèbres films d’animation dont "Kirikou". Il a immédiatement compris les enjeux des différents sujets qu’il a su traduire avec sensibilité et justesse. Il a construit un bel univers poétique, décliné et adapté à chaque séquence animée. Les émotions, les sensations passent par la couleur, le rythme. On retrouve une patte commune sur les différentes vidéos, mais il a joué sur la couleur pour apporter une tonalité différente à chaque reconstitution animée. C'est merveilleux de les voir prendre corps.


*Son dernier film Josep a remporté de nombreux prix.http://les-fees-speciales.coop/portfolio_page/josep/
À qui s'adresse l'application ?


L'idée était de s'adresser à différents types de publics en proposant trois modes de visites /parcours :
1. un parcours libre qui permet de découvrir les lieux sans prescription d'ordre et au fil de ses promenades
2. Un parcours pour les familles, friandes de ce type d'expériences ludiques, à partager entre enfants et adultes
3. Un parcours pour adultes, en mode escape game dans la ville, pour ceux qui ont envie d’apprendre tout en jouant

Fabre & The City, c'est 3 missions, 14 lieux, 3 grandes périodes historiques (Moyen-Âge Renaissance/Époque moderne, Période post-révolutionnaire-XIXeme siècle), le tout couvrant 800 ans d'histoire. Les différents scenarii permettent de faire le lien entre les lieux du parcours, de voyager dans le temps en passant d’une période historique à l’autre. Chaque mission offre l’opportunité d’une belle promenade

Combien de temps dure une mission ?

Environ une heure trente. Les trois missions peuvent être réalisées dans la foulée pour les plus ambitieux ou en plusieurs fois pour ceux qui souhaitent faire durer le plaisir… ! Quand on a réalisé les trois missions, on gagne une entrée gratuite au musée.

Comment ça marche ?

Il n'y a pas de beacon comme pour la première saison. Le système est fait à partir de Google map ; il a été créé dans l'application avec un logiciel. Des points de géolocalisation à distance ont été définis, puis leur emplacement sur le terrain vérifié.

Qui d'autre s'est impliqué dans le projet ?

La société Atlantide a développé l’application et créé le game play. Ils n’en sont pas à leur première application jeux géolocalisée ! Florian de Manoir du crime nous a aidés à raconter de manière plaisante les histoires, avec des dialogues entre les voyageurs du futur et ceux du passé. Ces scenarii permettent de passer d'une période à une autre, d'amener l'énigme, d'apprendre de manière légère. L'Office de Tourisme a été un élément indispensable à la fois dans le relais (à travers l'accueil du public, des touristes, des futurs usagers) et dans la construction du dispositif testé sur le terrain. Leur rôle a aussi été déterminant dans la connaissance de l’histoire de la ville. Le Comité scientifique a permis de réunir une documentation riche et illustrée. Ces données scientifiques ont servi de base pour construire les scénarii et les documents historiques délivrés dans l’application à chaque déblocage de mission. Il est formé du Musée, de la Faculté de médecine, des Archives Municipales et du Service d'Art et d'Histoire de la Ville de Montpellier qui régit, entre autres, la Miséricorde.

Pour conclure, cette application est également un outil d'animation, que nous souhaitons faire vivre à travers, entre autres, des challenges étudiants. Notre objectif ? Aller à la rencontre d'autres publics et créer des ponts.